De la Nécropole vers l'au-delà |
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Au début de l'histoire, il y a le pharaon qui guide son peuple,
ordonné comme dans une immense pyramide, pour se rattacher à la pyramide
astrale. La route à suivre lui est indiquée par les textes sacrés qui
résument toute la science de l'univers visible et invisible.
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De la nécropole vers l'au-delà |
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Au début de l'histoire, il y a le pharaon qui guide son peuple, ordonné
comme dans une immense pyramide, pour se rattacher à la pyramide astrale.
La route à suivre lui est indiquée par les textes sacrés qui résument
toute la science de l'univers visible et invisible. Nous trouvons un écho
de cette science très ancienne pour la première fois dans les "textes
des pyramides", gravés sur les parois des chambres sépulcrales de la
pyramide d'Ounas (2400 av. J.-C.).
Lorsque le pharaon finira par devenir son propre guide, il y aura
de nombreux "livres des morts", "textes des sarcophages" et "livres de
la Douat", destinés à toute âme en route pour l'au-delà. Ces textes
présupposent la connaissance du royaume des morts à travers la foi
religieuse, et contiennent des règles de comportement, des formules
magiques, des rituels sacrés, des prières secrètes, de façon à mettre
le voyageur en condition de surmonter les différentes épreuves qui
l'attendent. Tout ceci varie d'une synthèse étroite du rapport entre
l'âme et l'esprit universel à une casuistique de plus en plus complexe
qui complique les rapports et les remplit d'images démoniaques, de
visions infernales, au fur et à mesure que progresse la conscience
individuelle et que diminue la puissance de la foi ancienne. Même
l'équilibre et la continuité entre vie terrestre et vie supra-terrestre
varient et oscillent entre deux extrêmes: celle qui fuit une immortalité
toujours moins compréhensible pour s'ancrer désespérément dans la vie
terrestre, et celle qui exalte la vie supra-terrestre comme libératrice
de cette vie tourmentée et angoissante.
Voici un exemple touchant du mépris de la vie et de l'admiration de
l'au-delà dans le chant d'un poète de 1790 av. J.-C. environ:
" Voici, la mort se tient devant moi comme la guérison
de l'infirme, comme la sortie au grand air après une longue maladie.
Aujourd'hui la mort se tient devant moi comme un parfum de myrrhe,
comme un repos sous la tente aux heures de brise... aujourd'hui la mort
se tient devant moi et m'attire comme la vue de sa maison pour celui
qui si longtemps a été prisonnier".
Le grand et ultime voyage commence par la séparation du Ka spirituel
du corps matériel. Le Ba, âme de l'homme est détaché de la vie terrestre
et tourne désorienté autour du cadavre. La compatissante Isis l'accueille
sous ses grandes ailes affectueuses et le confie au savant dieu Anubis
afin qu'il le réconforte et lui serve de guide et de soutien jusqu'au
jugement divin.
Tous deux se dirigent vers les confins du monde et exactement vers
l'une des quatre montagnes qui soutiennent le ciel: celle à l'ouest
d'Abydos, la ville sacrée d'Osiris. Ce très haut mont dépassé, l'âme,
avec le bateau de Kheper descend dans la "galerie de la nuit" où coule
le fleuve des Enfers. Anubis réussit à mener la barque sur les vertigineux
et continuels rapides du fleuve sillonné par les sinuosités du gigantesque
serpent Apophis (animal chtonien qui pénètre dans l'Amenti souterrain).
La barque, finalement, pénètre au cœur des Enfers, dans le royaume des
"choses secrètes".
Les berges et les eaux mêmes du fleuve grouillent d'êtres monstrueux
qui se jettent sur les voyageurs. Des babouins gigantesques tentent de
les capturer avec un grand filet; des serpents armés de longs couteaux
affilés, des dragons qui crachent le feu, des reptiles à cinq têtes
affamés, jaillissent continuellement de la terre et des eaux. Ce ne sont
que hurlements, menaces terribles, lamentations déchirantes d'ombres
errantes, d'êtres refu sés par l'esprit, de larves humaines sans tête
et ennemies d'Osiris. A la défense et au réconfort prodigués par Anubis
collaborent des êtres divins lumineux qui, en silence, se serrent
autour de la faible âme du défunt presque dé- truite par l'épouvante.
Finalement on arrive aux limites du royaume ténébreux de la Douat.
Pour en sortir il faut franchir sept portes, et pour entrer dans la
grande Salle d'Osiris il faut passer par dix pylônes. Chacune des portes
est gardée par une divinité: le dieu sorcier, le dieu gardien, le dieu
interrogateur. Pour passer, l'âme doit connaître les paroles magiques
voulues, et le nom secret du Gardien du Seuil, après quoi elle peut
dire: "Ouvrez-moi la porte, soyez mes guides".
Passées les sept portes commence le passage des sept pylônes et
chaque dieu maître du pylône lui révèle son nom secret pour l'éternité.
Après le dernier pylône, l'âme entre dans la "Grande salle de
justice d'Osiris". Tout autour se tiennent les dieux de l'univers,
les Ka cosmiques, images du dieu absolu lui-même dans lequel ils se
reflètent en mille couleurs comme en un gigantesque kaléidoscope
(dans le tombeau de Touthmosis III sont représentés 741 dieux). Au
milieu s'élève une pyramide à degrés que l'âme, fatiguée de sa longue
épreuve, monte toujours aidée du bon Anubis. Sur la plate-forme, au
sommet de la pyramide, il y a quatre grands-Juges, c'est-à-dire les
couples qui ont donné origine au créé: Shou et Tefnout (air et feu);
Geb et Nout (terre et ciel). Ces juges, pure expression de la création
divine et pour cela de la Justice et de la Vérité, sont présents avec
Osiris. Aux pieds du dieu roi de l'au- delà, il y a la gigantesque
balance pour la " pesée du coeur ".
Le moment culminant est ainsi arrivé, l'âme est seule devant le
dieu suprême et doit démontrer qu'elle " n'a jamais rien fait de mal
contre personne ".
De grands et clairs idéaux ont guidé celui qu'on juge pendant toute sa vie:
" Si tu es grand après avoir été petit, si tu es riche
après avoir été pauvre ne sois pas avare de tes richesses parce qu'elles
te sont venues comme un don de Dieu... Si donc tu cultives tes champs
et qu'ils sont fructueux, ne remplis pas seulement ta bouche, souviens-toi
de ton voisin, car l'abondance t'a été donnée par Dieu...".
Ptahhotep, dans ses maximes que l'on ré- péta pendant deux mille cinq cents ans avertit:
"Ne sème pas la crainte parmi les hommes car Dieu te
combattra dans la même mesure, en ce que, à celui qui prétend conquérir
la vie par la violence Dieu lui ôtera le pain de la bouche, lui ôtera
ses richesses et le réduira a l'impuissance. Ne sème pas la crainte
parmi les hommes, donne- leur une vie de paix et tu obtiendras par la
paix ce que tu devrais obtenir par la guerre, car c'est la volonté de
Dieu".
Mais le plus grand "monument" que l'Egypte antique ait donné à
l'éthique mondiale est contenu dans les phrases que prononce Nefertêm-Rê
au Grand Jugement:
"J'ai donné du pain à l'affamé, j'ai donné à boire à
celui qui avait soif; j'ai vêtu celui qui était nu, j'ai fait passer
le fleuve à celui qui n'avait pas d'embarcation, j'ai enseveli celui
qui n'avait pas d'enfants".
Que l'on remarque que ces piliers de la bonté humaine sont répétés
dans de nombreux mastabas, donc qu'ils font partie des idéaux qui,
trois mille ans avant, préparaient la voie qui menait au Royaume des cieux.
Pour revenir au voyage dans l'au-delà, une fois que l'âme a révélé
ses actions, son cœur - qui les contient - est "pesé". Anubis lui-même
pose le petit vase avec le cœur sur un plateau, et sur l'autre met le
contrepoids, c'est-à-dire la plume de Ma'ât, déesse de la Vérité, et
enfin débloque la balance.
Le dieu Thot note les opérations; tandis que de la terre émerge le
monstre Amenuit, crocodile-léopard-hippopotame, prêt à engloutir l'âme
perdante et à l'entraîner dans les ténèbres de Sokaris.
Si le cœur est plus léger que la plume, l'âme est "justifiée" et
le Ka spirituel lui redonne la vie pour l'éternité. Certains papyrus
représentent ce moment enchanteur avec l'image de la momie étendue au
sommet d'une pyramide à degrés, contemplant l'espace infini, tandis que
huit astres blancs semblent descendre et la pénétrer lentement.
Ensuite commence la vie dans le Paradis, c'est-à-dire dans les
"Champs de Ialou ": d'abord, l'âme se purifie de tout déchet terrestre
en se baignant dans le "lac du lotus "; après quoi, redevenue pure et
jeune comme dans le sein de la Déesse Mère Mout, elle croît et travaille,
heureuse, dans les champs du Paradis et réunie aux siens, va à la chasse
et à la pêche le long du Nil céleste. Dans cet enchantement de la vie
dans la nature, dans ce retour à l'âge d'or du royaume d'Osiris sur la
terre, filtre progressivement le royaume solaire du pur esprit: les
âmes purifiées montent toujours plus haut le long de l'échelle tissée
par les rayons lumineux d'Aton-Rê jusqu'à ce qu'elle atteigne la "Barque
de la Vérité".
La dernière étape du Grand Voyage vers l'éternité prend trois aspects importants.
- Le premier est déjà contenu dans la pensée antique
où la personnalité humaine, une fois régénérée et "justifiée",
continue à opérer en tant que partie du tout et de la volonté
divine, s'unissant â l'armée d'Horus pour combattre le mal et la
souffrance sur terre.
- Le second, c'est-à-dire l'anéantissement de son âme dans
le Nirvana égyptien, se reflète dans une très belle image des
"Contes de Sinouhé": "...fut enlevé au ciel et ainsi se trouva
uni au disque du Soleil et son corps retourna à celui qui l'avait
engendré ".
- Le troisième, la découverte de son propre Être dans l'Absolu, est chanté par l'âme béatifiée:
"Je suis hier, je suis aujourd'hui et je connais
demain... je suis Re et Rê est moi... l'Etre est en moi, le
non-Etre est en moi"... " je suis maître de l'âme de Dieu qui
m'enferme dans son sein".
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Transport de la momie à la Nécropole
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1 - Dans la "Maison de la vie", on prépare la momification du cadavre. Les parties internes du corps sont préparées séparément et placées dans quatre vases canopes.
2 - Un prêtre lit le rituel. La momie est enveloppée dans des bandes de lin, dans lesquelles sont placés des talismans, et couverte du masque sacré.
3 - Le cortège descend vers le fleuve avec le catafalque de la momie et le mobilier funéraire.
4 - Le cortège avance avec les barques vers le tournant du sanctuaire (d'Abydos).
5 - Débarquement du cortège sur les rives de la nécropole.
6 - La momie avec sa barque et son précieux mobilier est portée sur les degrés en pente raide creusés dans la roche.
7 - On accomplit la cérémonie finale de l'"ouverture de la bouche et des yeux". Les pleureuses, l'époux(se) et les enfants enlacés aux pieds de la mo,ie, exhalent leur dernière lamentation.
8 - Le tombeau est déjà prêt.
9 - Une partie du mobilier a été portée dans la chambre des offrandes.
10 - Le trésor a déjà été porté dans la chambre exprès.
11 - Dès que l'aménagement de dons et de la momie dans les salles de sarcophages sera terminée, les pièces seront murées et les accès, remplis de cailloux et de sable, seront scellés.
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Le voyage dans l'au-delà
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a - Séparation du Ka (esprit) et du Ba (âme).
b - Anpu (Anubis) guide affectueusement le défunt.
c - Commencement du voyauge sous la protection d'Eset (Isis).
d - Arrivée à la montagne occidentale, porte des Enfers.
e - Descente du fleuve de la "galerie de la nuit". Voyage dans le royauùe ténébreux de Seth.
f - Des babouins gigantesques tentent d'entraver la barque.
g - Les "ennemies d'Asar (Osiris)" assiègent la barque.
h - Le serpent Apep (Apophis) tente de barrer l'accés.
i - Epreuve des Sept Portes de sortie.
j - Epreuve des Dix Pylônes d'entrée.
k - Montéede l'"Escalier de Justice". Y assistent tous les Dieux-Ka du créé.
l - Jugement final devant Asar (Osiris). Anpu (Anubis) pèse le coeur avec la plume. Thot et le monstre Amenuit surveillent.
m - L'âme rachetée se purifie dans le "lac du lotus".
n - Vie éternelle dans les paradisiaques "champs de Ialou"; Chasse, pêch, travail, le long du "Nil Céleste".
o - Jonction avec le Ka immortel, montée et identification avec l'Etre suprême -Ra.
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